Discours de Michel Valadier pour l’inauguration du bâtiment Saint-Jean-Bosco

6 décembre 2014, « Et de trois ! »

Chers amis et chers bienfaiteurs,

Enfin, après une longue attente de quatre ans, nous pouvons voir, toucher et admirer -je l’espère, cette nouvelle réalisation que nous avons tant espérée.

L’espérance… Charles Péguy, tombé au combat le 5 septembre 1914, il y a 100 ans, en a si bien parlé : Ecoutons-le dans Le Porche du mystère de la deuxième vertu :

«Ce qui m’étonne, dit Dieu, c’est l’espérance. Et je n’en reviens pas. Cette petite espérance qui n’a l’air de rien du tout. Cette petite fille espérance. Immortelle.Car mes trois vertus, dit Dieu. Les trois vertus mes créatures. Sont elles-mêmes comme mes autres créatures de la race des hommes. La Foi est une Épouse fidèle. La Charité est une Mère. Une mère ardente, pleine de cœur. L’Espérance est une petite fille de rien du tout. Qui est venue au monde le jour de Noël de l’année dernière.C’est cette petite fille pourtant qui traversera les mondes. Cette petite fille de rien du tout. Elle seule, portant les autres, qui traversera les mondes révolus.Mais l’espérance ne va pas de soi.La petite espérance s’avance entre ses deux grandes sœurs et on ne prend pas seulement garde à elle.Et l’on n’a d’attention, le peuple chrétien n’a d’attention que pour les deux grandes sœurs. La première et la dernière. Qui vont au plus pressé. Au temps présent. À l’instant momentané qui passe. Et il ne voit quasiment pas celle qui est au milieu.La petite, celle qui va encore à l’école. Et au milieu entre ses deux grandes sœurs elle a l’air de se laisser traîner. Comme une enfant qui n’aurait pas la force de marcher. Et en réalité c’est elle qui fait marcher les deux autres. Et qui les traîne. Et qui fait marcher tout le monde. Et qui le traîne. Car on ne travaille jamais que pour les enfants. Et les deux grandes ne marchent que pour la petite ».

Eh bien aujourd’hui, la petite sœur Espérance a donné naissance à une nouvelle école, une école de rien du tout comparée à toutes les autres écoles de France, mais cette école est la nôtre. Ce bâtiment, le 3ème de notre groupe scolaire, nous ramène sur la commune de Port-Marly ou nous sommes nés en 1992. Mais le Pecq n’est pas loin puisque le découpage des villes est curieux dans notre secteur. Vous allez très bientôt avoir l’occasion de le visiter. Il est couronné par la grande chapelle, bénie le 20 novembre dernier par SE Monseigneur Eric Aumônier. De ce terrain tordu, en pente et enclavé, l’équipe de parents et d’anciens parents qui ont porté ce projet a réussi à faire un bel endroit paisible et agréable. Nous avons d’ailleurs reçu des lettres très touchantes d’élèves nous remerciant pour les classes spacieuses, pour la grande cour de récréation, pour la belle chapelle. Certains nous promettant de veiller sur ces lieux et d’y bien travailler. Espérons qu’ils n’aient pas – comme trop de français – la mémoire courte !

Mais, me direz-vous, il est facile de réaliser une telle construction quand on a de l’argent ! Que de fois avons-nous entendu ce refrain : vous êtes riches et d’ailleurs vos parents ont de grosses voitures, cqfd. Où trouvez-vous donc tout cet argent ? Saint Laurent, diacre de l’Eglise romaine primitive fût arrêté un jour par le Préfet païen de la ville et sommé de lui livrer les trésors de l’Eglise, / car l’Etat avait besoin d’argent, déjà !… Saint Laurent demanda un délai pour le rassembler et vint trouver le préfet avec tous les orphelins dont l’Eglise s’occupait, en déclarant : voilà les trésors de l’Eglise ! Il paya cette audace de sa vie et mourut sur un grill. Si nous transposons, je vous dirai que notre richesse à nous, ce sont les donateurs qui par centaines nous apportent leur obole chaque année et qui le font plus particulièrement dès que nous avons besoin de construire.Chers donateurs qui avez pu venir en ce jour, nous sommes heureux et fiers de vous recevoir chez-vous, pour vous remercier, vous fêter et vous manifester notre immense gratitude. Car si nous sommes riches, c’est de votre soutien sans faille. Au-delà des nombreuses personnes privées qu’il faudrait toutes remercier, nous voudrions citer deux associations, L’œuvre Saint-François de Sales et la Fondation pour l’Ecole.

L’œuvre Saint-François de Sales, fondée par le petit fils de la comtesse de Ségur est une Œuvre vient en aide aux projets d’éducation et nous soutient depuis le début. Soyons clairs : sans l’œuvre saint François de Sales, il n’y aurait pas d’école Saint-Dominique. Permettez-moi donc de saluer avec émotion Me Hubert Le Griel, président honoraire, qui nous a en outre fait profiter de son expérience et de sa sagesse sur des sujets pédagogiques difficiles ; M. Hubert Vauthier ici présent. M. Alain Rostand. Et encore Michel De Jeaghere l’actuel président de cette belle œuvre et soutien indéfectible de notre école sans oublier les membres de son Conseil ici présents. Ils ont tant faits pour nous et pour des écoles semblables à la nôtre.

La Fondation pour l’Ecole, représentée ici par sa fondatrice et directeur général, Anne Coffinier. Cette association soutien les écoles indépendantes et plus particulièrement les fondations d’école. Chère Anne, vos conseils avisés et vos appels à la mobilisation quand il le fallait, nous ont évité bien des soucis – je pense à une bataille très importante, en 2012, menée pour obtenir un rescrit fiscal et répondre à une attaque contre les écoles indépendantes ; épisode peu connu du public et au cours duquel Alain Gournac a joué un rôle décisif. Par ailleurs, votre soutien à la réalisation de ce projet d’extension a été déterminant, c’est-à-dire essentiel ! Les familles, qui payent déjà un lourd tribut avec les scolarités, auraient tout simplement été incapables de financer un tel projet.

Beaucoup ont du mal à payer leurs scolarités et sont aidés par d’autres associations que nous remercions ici en leur nom. Citons entre autre, l’AES – Association Education Solidarité – fondée par le Père Yannick Bonnet et M. Marchadier ; ou encore le MCF – Mouvement Catholique des Familles – du général Legrier.

Mais ces familles donnent ce qu’elles ont : leur foi dans notre œuvre en y inscrivant leurs enfants et, croyez-moi, il fallait un peu d’inconscience pour « essuyer les plâtres » lors des ouvertures du primaire, des collèges et enfin des lycées. Sans cette foi, nous ne serions pas passés de 30 élèves en 1992 à 800 aujourd’hui. Ces familles y mettent aussi leur enthousiasme ; ceux qui étaient présents au déménagement et à l’emménagement des 8 et 11 novembre dernier se souviendront longtemps de l’ambiance formidable qui régnait ici et dans les autres bâtiments, lorsque Directeurs, aumôniers, parents et élèves, soit 200 personnes en tout ont déplacé, nettoyé et réaménagé toutes les classes, pour que chacun puisse faire une nouvelle rentrée scolaire, dans la configuration actuelle et en plein mois de novembre. Et aujourd’hui, ce sont ces mêmes enseignants et familles, présents ou non qui font monter vers le ciel une grande prière d’action de grâces pour vous tous qui d’une façon ou d’une autre avez apporté quelque chose à la réalisation de ce projet.

Mais vous avez la folie des grandeurs pensent certains, même bien intentionnées ! Comment allez-vous faire pour remplir ces nouvelles classes ? Il vous faut réaliser, bien chers amis, que ce bâtiment, pourtant opérationnel depuis 15 jours seulement, est déjà plein. Il doit rester 20 places disponibles à peu près. Et guère plus dans les deux autres bâtiments.

En effet, nous avions déjà tous nos élèves, entassés dans les deux autres bâtiments ou pour certains installés pendant 15 mois dans des locaux scolaires loués grâce à la bienveillance de Laurence Bernard, maire du Pecq. Précisons que l’idée est venue d’Alain Gournac à l’origine – encore lui ! Merci chère Laurence, car sans cela, nous étions réellement coincés. Que nos chers voisins se rassurent, ce nouveau bâtiment ne va pas amener dans le quartier une nouvelle ruée d’élèves. J’ajoute que – toujours grâce à nos élus – une route a été créée et permet de relier ce terrain directement au rond-point d’Aranjuez, sans avoir à passer par le quartier de l’Ermitage. Et il nous reste encore des marges d’amélioration car certains parents n’ont pas encore trouvé l’entrée… Mais cela viendra !

Vous l’avez compris, des familles – souvent nombreuses, ce qui en passant explique les grosses voitures ; allez mettre 7 enfants dans une twingo ou une C1 ? – de jeunes foyers nous rejoignent et prennent progressivement le relais de la première génération. D’anciens élèves commencent à inscrire leurs enfants, tandis que d’autres deviennent enseignants.

Avons-nous un secret de fabrication ? Je n’en suis pas certain, car nous travaillons, agissons sans prendre le temps d’y penser ; mais il me semble que s’il fallait résumernotre ligne de conduite d’un mot, celui qui semble le plus approprié serait : la cohérence. L’intuition des fondateurs était de proposer une école qui donne un enseignement cohérent avec les principes qu’ils essayaient et essayent toujours de vivre chez eux.Cohérence par les conséquences assumées de notre état de créature de Dieu. Et pourquoi ? Parce que c’est raisonnable ! C’est d’ailleurs ce que répondit le pape émérite Benoit XVI à un chef d’Etat français qui lui demandait : Très saint Père, pourquoi avez-vous la foi ? Parce que c’est raisonnable. Le président Sarkozy – émérite lui aussi – en fût semble-t-il très impressionné. Nous croyons en effet raisonnable d’accepter sans réserve cette réalité : nous sommes mortels, finis, limités ; doté certes d’une étincelle divine, mais elle ne vient pas de nous ; elle vient d’un autre, immortel, infini, parfait et que nous appelons : Dieu. C’est pourquoi, à côté de plusieurs temps de prières quotidiennes, de la possibilité de se confesser, de la messe hebdomadaire ou bimensuelles selon les classes, l’instruction religieuse a toute sa place dans notre enseignement, de la maternelle à la Terminale.

Et si nous sommes apparemment de plus en plus minoritaires à penser ainsi, écoutons encore Benoit XVI : « Ce sont les minorités créatives qui déterminent l’avenir. En ce sens, l’Église catholique doit être vue comme une minorité créative possédant un héritage de valeurs qui ne sont pas des choses du passé mais une réalité très vivante et actuelle. »« L’Eglise se perpétuera dans de petits cercles vivants, où des gens convaincus et croyants agiront selon leur foi. Mais c’est précisément ainsi qu’elle redeviendra sel de la terre. L’Eglise peut précisément être moderne en étant anti-moderne, en s’opposant à l’opinion commune. A l’Eglise incombe un rôle de contradiction prophétique et elle doit en avoir le courage”. Soyons cohérents, sans chercher à être dans le vent. Et comme nous sommes en automne, je ne résiste pas à vous citer la célèbre formule de Gustave Thibon : « être dans le vent, c’est une ambition de feuille morte !».

C’est aussi dans un souci de cohérence que nous avons fait le choix de la « non mixité » pour certains niveaux, c’est-à-dire au collège et au lycée. Economiquement, au départ, c’était une folie et il y eut de vifs débats entre nous.Il ne s’agit pas ici d’une peur de faire se rencontrer garçons et filles ; et d’ailleurs, ils arrivent ensemble par le même bus le matin ! Non, simplement, nous avons tiré les leçons de l’expérience des 40 dernières années et constatons chaque jour combien ce choix est bienfaisant en cours pour nos élèves. Au même âge, il y a une différence de maturité entre les garçons et les jeunes filles. La mixité obère les chances de succès de certains élèves, plus en difficulté. La psychologie et la sensibilité sont différentes chez les jeunes filles et les garçons, et un enseignement différencié est une vraie richesse. Nos professeurs du secondaire peuvent témoigner que l’on n’enseigne pas de la même manière à des classes de garçons ou de jeunes filles. Si vous en doutez, interrogez-les ; ils sont présents et pourront vous répondre tout à l’heure !L’idéologie dominante impose la mixité partout, sauf pour le mariage soit dit en passant, cela entraine bien des échecs scolaires et humains ; et c’est bien triste…

Cohérence enfin dans les décisions que nous prenons par rapport à certaines parties des programmes. Nous profitons d’être une école indépendante pour les adapter, ajouter ou retrancher ; sans pour autant mettre en péril le succès aux examens d’Etat et sans nuire aucunement à l’entrée dans les meilleures écoles de l’enseignement supérieur ; nos résultats le montrent. Il me semble donc en résumé que cette cohérence recherchée attire les parents et est même reconnue par nos grands élèves. Les anciens, que nous retrouvons lors de rencontres comme celle qui eut lieu ici-même le 22 novembre dernier, nous le confirment. Cohérence vient du latin : cohaerens, de haerere, qui veut dire : adhérer. Les familles qui inscrivent leurs enfants chez nous adhérent à notre projet, pas toujours parce qu’ils le partagent complètement, mais ils trouvent un ordre, une logique dans ce que nous entreprenons. Par exemple, les familles qui nous rejoignent ne vont pas toutes habituellement à la messe en latin, comme on appelle aujourd’hui la forme extraordinaire du rite romain, messe qui est célébrée ici par les chanoines de l’Institut du Christ Roi Souverain Prêtre. Mais ils viennent tout de même à Saint-Dominique parce qu’ils ont compris que notre projet était cohérent et global et que cette liturgie éduque de manière exceptionnelle aux Saints Mystères, au sens du sacré et manifeste qu’en premier et dernier lieu, Dieu seul est le vrai Maître. Le monde qui nous entoure, par contraste, donne le sentiment d’être sans boussole et incohérent.

Notre pays semble s’enfoncer toujours plus dans la décadence. L’un des livres les plus vendu depuis plusieurs semaines porte un titre éloquent : « Le suicide français – Les quarante années qui ont défait la France» d’Éric Zemmour. Ce livre, dont beaucoupparlent, rencontre un écho dans un autre livre qui lui vient tout juste de sortir. Il y a de telles résonnances entre eux et pourtant la période est si éloignée, je veux parler du dernier livre de Michel De Jaeghere, directeur des hors-séries du Figaro : « Les derniers jours – La fin de l’Empire romain d’Occident ».Décidément Bainville avait raison : « tout a toujours été très mal !». Et pourtant…Que faire face à cela ? Etre ce que nous sommes, et l’être bien, tout simplement. Nous espérons donc être une petite oasis au milieu d’un monde où beaucoup de gens ont soif. Les signes d’espoir abondent, aujourd’hui comme dans l’histoire de notre chère patrie. Pour revenir aux parutions récentes, lisez « Les déshérités ou l’urgence de transmettre » de François-Xavier Bellamy, jeune professeur de philosophie et maire-adjoint de Versailles, pour comprendre qu’il faut continuer à nous aider…Lisez « le roman de sainte Jeanne d’Arc » de Philippe de Villiers, pour réaliser que notre pays a déjà connu des situations dramatiques et s’en est finalement sorti, avec le secours du Ciel. Nous pensons qu’un sursaut est parfaitement possible et espérons y contribuer, à notre petite place.Quand ce sursaut interviendra-t-il ? Mystère. Jean Madiran nous a dit un jour : « nous sommes au temps des parents de Jeanne d’Arc ». C’était il y a 30 ans…

«Ouvrir une école, c’est fermer une prison » disait de son côté Victor Hugo, en 1848. De nos jours, ouvrir une école, ce n’est peut-être pas fermer une prison, mais au moins cela fait reculer le désespoir ; et ça, c’est une sacré bonne nouvelle !

Merci pour votre soutien.

Renouvellement de la consécration au Sacré-Cœur de Jésus du groupe scolaire Saint-Dominique.

Cœur Sacré de Jésus / Vous qui avez manifesté à Sainte Marguerite-Marie le désir de régner sur les âmes de vos enfants / nous venons aujourd’hui proclamer Votre Royauté sur notre groupe scolaire. Nous voulons vivre de votre Vie / nous voulons faire fleurir dans le sein de cet établissement qui veut être vôtre / les vertus auxquelles Vous avez promis la paix dès ici-bas / l’humilité dans la réussite / la franchise dans la camaraderie / la pureté dans nos pensées / le dévouement dans nos actions.Aidez-nous à bannir de nos actions et de notre attitude l’esprit du monde et ses illusions. Daignez, ô Divin Cœur / présider nos heures de classe / inspirer nos études / bénir nos efforts / écarter nos soucis / sanctifier nos joies et soulager nos peines. Si jamais l’un de nous avait le malheur de s’éloigner de Vous / rappelez-lui, ô Cœur de Jésus / que Vous êtes bon et Miséricordieux pour le pécheur repentant. Et quand sonnera l’heure des vacances ou des départs / permettez, nous vous en supplions / que nous restions fidèles à Vos décrets éternels / et reconnaissants des grâces reçues à l’ombre des oratoires de notre école. Daigne le Cœur Immaculé de Marie / daigne le glorieux patriarche Saint Joseph / daignent Saint Dominique, Sainte Catherine de Ricci et saint Jean Bosco / Vous présenter cette consécration / et nous la rappeler tous les jours de notre vie ! Ainsi soit-il !